Infirmières libérales : le stationnement et les PV

Le problème du stationnement est fréquent dans la profession d’IDEL, car la majorité des soins se font à domicile et le plus souvent en ville.Avec la disparition de nombreuses places de parking ces dernières années et de moins en moins de tolérance des agents du stationnement… les amendes pleuvent et certains IDEL en arrivent même à modifier leur façon de travailler : de nombreux collègues ont ainsi abandonné la voiture pour se convertir aux deux-roues.

Compte tenu de l’allongement de la durée de vie et du nombre croissant de personnes dépendantes nécessitant une aide médicale à domicile, les soins à domicile évitent bien souvent une hospitalisation et représentent une économie importante pour la collectivité.

Cependant, les difficultés de stationnement en ville pourraient devenir de plus en plus importantes à l’avenir et remettre en question la volonté politique de développement du maintien à domicile.

Un problème national de santé publique

Ces problèmes de stationnement ne concernent pas seulement les infirmières installées à Paris. Celles des autres villes, grandes ou moyennes, sont également concernées. Mais à Paris, la situation est parfois très délicate et rares sont les IDEL parisiennes n’ont pas eu droit à leur(s) PV de bienvenue !

Ces difficultés de stationnement amènent certaines infirmières libérales à ne plus prendre en charge les patients dans certains quartiers, ce qui remet en question l’égalité des droits et des chances en matière de santé.

Certaines infirmières ont lancé des pétitions comme les IDEL de Saint-Chamond dans la Loire ou à Paris.

À quoi sert le caducée infirmier ?

Le caducée infirmier officiel est envoyé tous les ans aux IDEL ayant réglé leur cotisation à l’Ordre Infirmier, mais il existe aussi des caducées officieux dans le commerce.

C’est un problème, car en l’absence de valeur légale du caducée infirmier l’agent verbalisateur n’a pas la preuve que le véhicule est utilisé à des fins professionnelles pour l’exécution de soins à domicile.

Le caducée ne vous exemptera pas donc pas de la contravention. Il ne vous reste plus qu’à tenter la contestation.

Remarquez toutefois que le caducée remis par l’Ordre Infirmier comporte la mention “Soins à Domicile” à la différence des collègues hospitaliers.

L’impact financier des PV

Vous le savez, à 2,50 € le déplacement, le PV est lourd à digérer pour les IDEL. La photo qui illustre cet article est véridique : trois PV de stationnement en moins d’une semaine.

Avec un tarif conventionnel de 7 € brut pour une injection, prendre un PV qui, rappelons-le, n’est pas déductible des frais professionnels, reste aussi douloureux que votre injection 🙂

Certaines se plaignent à juste titre des frais engendrés par ces PV

Parfois, c’est la voiture qui se retrouve à la fourrière : l’addition se révélera salée et cela complique sérieusement la suite de la tournée ! Toutefois, certaines municipalités ont donné des consignes pour que les agents, lors de la présence d’un caducée, ne demandent pas la mise en fourrière du véhicule.

Dans certains quartiers les IDEL ne peuvent se déplacer qu’en vélo, trottinette, à pied voire en transport en commun. Pourtant il n’est pas possible de voir autant de patients que les collègues qui travaillent sans ces contraintes et c’est donc parfois un réel problème économique, car les soins sont proposés aux mêmes tarifs conventionnels partout en France.

Certains collègues ont tout simplement prévu un budget PV. Mais elles ne pourront pas déduire ces frais “professionnels”…

Une tolérance des pouvoirs publics ?

Vous l’aurez compris, le caducée n’est pas un passe-droit et ne pourra pas justifier un comportement qui ne respecterait pas le Code de la route.

Pourtant, deux circulaires (La  circulaire  69-140 du 27 mars 1969 et la circulaire 86-122 du 17 mars 1986 dite “circulaire Joxe”) et des réponses écrites à des questions de parlementaires ont rappelé aux forces de l’ordre que les infirmiers libéraux bénéficient d’une certaine tolérance en matière de stationnement.

Ainsi, les agents sont appelés à faire preuve de “discernement” lorsque le véhicule est utilisé à des fins professionnelles – mis en évidence par le caducée – et « dès lors que l’infraction éventuellement commise n’est ni de nature à gêner exagérément la circulation publique, ni, a fortiori, à porter atteinte à la sécurité des autres usagers ».

Malheureusement, ces recommandations sont plus ou moins suivies selon les villes.

Enfin, il faut rappeler que cette indulgence ne s’applique pas aux stationnements gênants tels ceux en double file, couloirs de bus, devant les entrées carrossables ou sur un passage piétons, etc.

Et les autres places ?

Sachez que malgré les demandes de certains syndicats, l’utilisation des places de livraison n’est toujours pas autorisée.

Rappelons également que places réservées aux personnes handicapées sont bien entendu interdites.

Autre solution, mais aujourd’hui utopique : réserver des places de stationnement aux soignants.

Pourtant, l’État a déjà apporté des solutions réglementaires spécifiques de stationnement, par exemple pour les taxis, les véhicules de livraison ou de transport de fonds.

Les solutions apportées par les municipalités

Certaine mairies, comme à Paris, mettent place des systèmes dédiés aux IDEL, comme le Sésame soins à domicile qui depuis 2008 et permet de stationner gratuitement pendant 1h15 sur les emplacements de stationnement payant. Ce dispositif coûtait 90 euros par an.

Il a été remplacé depuis le 1er mai 2015 par une carte PRO à Paris  « Professionnel mobile à Paris » d’une durée d’un an au tarif de 240 €.  Elle permet d’utiliser les emplacements payants au tarif horaire unique de 0,50€ sur tout Paris.

Mais entre la disparition des places liées aux installations Vélib ou Autolib, encore faut-il pouvoir trouver une place disponible…

Certaines mairies délivrent des “laisser-passer” aux IDEL à apposer sur le pare-brise.

Enfin, il semble que la pratique consistant à disposer d’un ticket de stationnement du jour affichant un montant minimal est encore tolèrée par certains agents …mais aucun écrit légal n’en fait mention.

Quelques conseils utiles

– Prévoir deux caducées, un sur le pare-brise et l’autre à l’arrière, car bien souvent le caducée du pare-brise n’est pas remarqué lorsque seule la plaque arrière du véhicule est relevée depuis la voiture de police ;
– Mettez vos warnings sur une place de livraison ou si vous n’avez pas trouvé de place ;
– Disposez un disque de livraison avec l’horaire d’arrivée ;
– Laissez une feuille de soins avec inscrit « SOINS A DOMICILE » bien visible ;
– Mettez un mot “Infirmière en soins à domicile” avec votre numéro de téléphone ;
– Organisez vos tournées en fonction des places disponibles.

Comment contester le PV ?

Vous souhaitez contester la contravention ? Prévoyez un peu de travail administratif !

En effet, vous avez 45 jours à compter de la constatation de l’infraction ou de l’envoi de l’avis de contravention pour contester.

Vous ne devez pas payer la contravention, mais remplir le formulaire de requête en exonération joint à l’avis de contravention accompagné de l’original de l’avis (faites une photocopie pour votre dossier).

Voici un courrier type de contestation de PV infirmier à télécharger :
Modèle de lettre de contestation PV infirmier (format Word, 1,5 Mo)

Attention à ne surtout ne pas donner les coordonnées du patient pour des raisons de secret médical.

N’hésitez pas à y joindre la photocopie de votre carte professionnelle délivrée par l’Ordre Infirmier et une feuille de soins barrée. Elle est parfois réclamée par la suite.

Le tribunal de police appréciera ensuite la suite à donner à votre dossier. Si vous n’avez pas de nouvelles au bout de quelques semaines, vous pouvez croiser les doigts.

Cette procédure fonctionne la plupart du temps, mais elle est chronophage (surtout si vous avez un PV par jour !), la plupart des collègues finissent donc pas payer par manque de temps : 17 € si vous payez tout de suite, 33 € au delà de 45 jours).

Et vous, qu’en pensez-vous  : vous êtes-vous déjà fait verbaliser durant vos tournées ? Quelles solutions avez-vous adoptées ?

Pour en savoir plus :

http://www.senat.fr/questions/base/1997/qSEQ971104087.html
http://questions.assemblee-nationale.fr/q13/13-74777QE.htm
http://questions.assemblee-nationale.fr/q14/14-16251QE.htm
http://www.conseil-de-lordre-infirmier-de-paris.com/?p=1628

Par Abdel IAZZA
IDEL à Paris