Contrats libéraux : obligation d’un écrit et obligation de transmission au conseil de l’Ordre

Le régime des contrats signés entre les infirmiers libéraux est défini avec précision par l’article R. 4312-73 du Code de la santé publique, où il est classé dans le Code de déontologie. Voici l’examen de ce texte, paragraphe après paragraphe.

Paragraphe I

« I.-Tout contrat ou avenant ayant pour objet l’exercice de la profession est établi par écrit. Toute association ou société à objet professionnel fait l’objet d’un contrat écrit.
« Ces contrats doivent respecter l’indépendance de chaque infirmier ».

Ce paragraphe pose deux principes : l’obligation de l’écrit, et le fait que le contrat doit toujours respecter l’indépendance de l’infirmier. A priori, c’est banal, mais en réalité, cela pose toute la question des sociétés de fait, qui sont très nombreuses dans la pratique : deux ou plusieurs infirmiers exercent la profession à partir du développement d’une même patientèle. C’est le travail commun avec cette patientèle unique, liée à une prise de décision partagée, qui crée cette notion de société de fait, par la pratique quotidienne, sans la signature d’un document. La société de fait est un vrai contrat, mais oral, et il est parfaitement légal, car il est régi par les articles fondamentaux du Code civil.

Pour des raisons pratiques, mais aussi pour satisfaire aux dispositions de l’article R. 4312-73, il est donc très souhaitable de « compenser » l’absence de statut écrit de la société par un règlement intérieur, relevant une série de règles de fonctionnement, qui devra aêtre transmis à l’Ordre par application du II.

Paragraphe II

« II.-Les contrats et avenants mentionnés au I sont communiqués au conseil départemental de l’ordre dont l’infirmier relève. Ce conseil vérifie leur conformité avec les principes du présent code de déontologie ainsi que, s’il en existe, avec les clauses essentielles des contrats types établis par le conseil national.
« Le conseil départemental de l’ordre peut, s’il le juge utile, transmettre pour avis les contrats ou avenants, statuts d’association ou de société, au conseil national ».

Les contrats « ayant pour objet l’exercice de la profession » doivent donc être transmis au conseil départemental. La formule est très générale…

Le régime de cette transmission a été défini par la jurisprudence pour les autres ordres professionnels. C’est une règle générale, et elle joue également pour les infirmiers salariés (CSP, Art. R. 4312-65.-I).
Le défaut de transmission ne conduit pas à l’annulation de l’accord, mais c’est une faute professionnelle disciplinaire.
Le but de cette transmission est de permettre au conseil départemental de vérifier que le contrat respecte l’indépendance de l’infirmière et les règles déontologiques. Pour faciliter ce travail, le conseil national publie des « contrats-types ». Si le conseil départemental estime que le contrat ne respecte pas les règles déontologiques, il en avise les signataires et leur demande de modifier le contrat.
Si les personnes intéressées passent outre, en estimant que leur contrat est valable, elles le peuvent, et elles doivent songer à convaincre le conseil départemental par leurs arguments. Pour sa part, le conseil départemental peut estimer que ce contrat viole les principes déontologiques, et il est alors susceptible de déposer une plainte disciplinaire.

Paragraphe III 

« III.-Tout contrat d’association ou de société ayant un objet professionnel entre un ou plusieurs infirmiers d’une part, et un ou plusieurs membres de professions de santé ou toute autre personne, d’autre part, est communiqué au conseil départemental de l’ordre. Celui-ci le transmet avec son avis au conseil national qui examine si le contrat est compatible avec les lois en vigueur, avec le code de déontologie et notamment avec l’indépendance des infirmiers ».

Ce paragraphe concerne les contrats d’association de sociétés, et la procédure mise en place est lourde : le conseil départemental rend un avis mais doit le faire valider par le conseil national. On voit dans toute la difficulté avec les nombreuses sociétés de fait…

Paragraphe IV

« IV.-Les projets de convention ou de contrat établis en vue de l’application du présent article peuvent être communiqués au conseil départemental de l’ordre, qui fait connaître ses observations dans le délai d’un mois.

Ce paragraphe institue une mesure pratique, à savoir une consultation du conseil départemental avant la signature. Pour les contrats courants, le plus simple est tout de même de s’inspirer des modèles sont les contrats types

Paragraphe V 

« V.-L’infirmier signe et remet au conseil départemental une déclaration aux termes de laquelle il affirme sur l’honneur qu’il n’a passé aucune contre-lettre relative au contrat ou à l’avenant soumis à l’examen du conseil ».

Les rédacteurs des textes redoutent la fraude, et il est donc demandé à l’infirmière d’affirmer que sa déclaration est sincère et il n’y a pas de « contrat caché ».