
Dans un article publié le 23 juillet, le British medical journal (BMJ) accuse le laboratoire allemand Boehringer Ingelheim d'avoir dissimulé des informations aux autorités de santé pour faciliter l’autorisation de mise sur le marché de son anticoagulant Pradaxa en 2010.
Utilisé pour prévenir le risque d'accident vasculaire cérébral et d'embolie, le Pradaxa fait partie de la nouvelle génération d'anticoagulants oraux (NACO), qui vise à remplacer les antivitamines K. Contrairement aux AVK, les NACOs ne nécessitent pas de suivi régulier de la coagulation du sang. Revers de la médaille : en cas de problème, ils n'ont pas d'antidote, à l'inverse des AVK.
D'après l'enquête du BMJ, des documents internes du laboratoire Boehringer Ingelheim, non transmis aux autorités de santé, montreraient que les risques d’hémorragie majeure pourraient être réduits de 30 à 40 % avec le Pradaxa par rapport à l'AVK warfarine, à condition de pratiquer un suivi de la coagulation et une adaptation des doses. Une information démentie par un porte-parole de Boehringer Ingelheim, qui affirme que les données recueillies par le laboratoire lors d'essais cliniques ne permettaient pas de trancher en faveur d'un suivi régulier de la coagulation.
Rappelons que des effets indésirables graves ont été signalés avec le Pradaxa, notamment des hémorragies mortelles. Quatre plaintes de familles de personnes âgées décédées après la prise de ce traitement ont été déposées en France en octobre 2013, mais classées sans suite en mars 2014. Aucun lien n'a en effet pu être démontré entre la prise du médicament et le décès des patients.
Par ailleurs, l'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) et l’assurance-maladie ont présenté conjointement deux études en vie réelle sur les NACOs. Elles ont conclu à l'absence d’augmentation du risque hémorragique pour un patient sous dabigatran (Pradaxa) ou rivaroxaban (Xarelto) par rapport à un patient sous antivitamine K, ou en cas de changement de traitement (passage d’un AVK à un NACO). Cependant, malgré ces premiers résultats rassurants, les autorités sanitaires notent que la période de suivi est très courte et appellent à poursuivre la surveillance renforcée de ces nouvelles molécules. De son côté, la Haute autorité de santé est actuellement en train de réévaluer trois NACOs, dont le Pradaxa. Les résultats devraient être rendus publics en novembre.