La décision d’un juge remet en cause un principe de bioéthique sur le don de tissus et des syndicalistes hospitaliers font un calendrier qui buzze sur internet : Une semaine infirmière.

 

Un juge remet en question une loi bioéthique.

Un juge de grasse a permis à des parents de conserver à titre privé, dans une banque d’Angleterre, le cordon de leur enfant à naître. Et cela provoque un tollé dans le monde médical.

Pour bien comprendre cette décision il faut rappeler que la loi bioéthique de 1994 a décidé que le corps humain était « hors patrimoine » (ce n’est pas un meuble dont on hérite…) et que les dons de tissus ou d’organes, sauf cas spécifiques, se doivent d’être anonymes, gratuits et non dirigés.

Pour résumer, ses tissus (sang, moelle…) ou ses organes (reins etc.) soit on les garde pour soi à leur place d’origine, soit on les donne à la communauté mais on ne les vend jamais (en France en tout cas). Quand on les donne, le principe général est le don anonyme, gratuit et non dirigé (on donne « à la société » mais pas à une personne en particulier) sauf dans le cas de l’autogreffe (où l’on se donne pour soi-même son sang en prévision d’une intervention) ou le don familial lorsque en présence de la maladie d’un de ses membres (A), pour des raisons de compatibilités tissulaires, un autre membre de la même famille (B) donne un organe (B donne à A). Mais il est aussi pour principe que ce don existe uniquement lorsque la maladie est avérée.

Encore plus particulièrement le don de cordon ombilical lors de la naissance (porteur de cellules-souches) est par principe un don anonyme, gratuit et non dirigé (la mère donne son cordon « à la France » qui l’en remercie chaleureusement) sauf dans le cas où une pathologie dans la fratrie de l’enfant est avérée, auquel cas le don de cordon peut être dirigé pour ce frère en particulier (ce qui déjà pose des questions éthiques sur les "enfants médicaments" que l’on ferait pour récupérer le cordon mais passons, nous n’en sommes pas là).

Et c’est donc dans ce contexte qu’un juge de Grasse a rendu un jugement qui permet à des parents de conserver le cordon de leur enfant à naître, dans une banque en Angleterre, alors qu’il n’y a pas de maladie avérée dans la famille mais uniquement un passé de pathologies lourdes chez les ascendants de l’enfant à naître. Mieux, la pathologie des ascendants (le cancer du foie et du pancréas) n’est pas à ce jour traitée par du sang de cordon mais le juge motive sa décision « Au regard des nécessités thérapeutiques dûment justifiées ». Pour mieux comprendre la portée de ce jugement, on peut lister une partie des questions qu’il soulève :

– Qu’est ce qu’une « nécessité thérapeutique dûment justifiée » ? Surtout quand le prélèvement n’a pas de lien connu à ce jour avec la pathologie ? Par exemple, est-ce qu’une arrière-tante qui souffrait d’anémie justifie de mettre en réserve tous les mois un litre de son sang « en prévention » de sa propre anémie potentielle ?

– À qui appartient ce cordon ? À la mère ? Au père ? À l’enfant ? Au couple ? Et si le couple se sépare à qui revient-il ? Si un des parents meurt qui en hérite ? Si l’enfant meurt peut-on l’utiliser ? À ces dix-huit ans l’enfant devient-il propriétaire de son cordon ? Ou de la moitié ? Et si les parents font usage de ce cordon avant les 18 ans de l’enfant pour un de ses frères pourra-t-il leur reprocher une « perte de chance » ?

– Le cordon étant conservé en Angleterre, quel droit doit-on lui appliquer ? Le droit français ou le droit anglais ?

– Devient-il légitime pour chacun de se faire sa propre réserve biologique tout au long de sa vie « en prévision » d’une « nécessité thérapeutique dûment justifiée » ? Cette réserve doit-elle publique ou privée ? À quelle règle de droit sur la propriété appartient-elle ?

– Si on devient propriétaire de son cordon, de ses tissus, peut-on les vendre ? À qui ? Dans quelles conditions ? Y aura-t-il alors une obligation morale de cession aux malades ? Dans quelles conditions ?

– Si la conservation des tissus relève du droit privé, à qui la charge de cette conservation revient-elle ? La réserve biologique sera-t-elle alors un luxe réserve à ceux qui sont nés riches ?

Et sinon…

– Pendant que ce sang de cordon sera conservé en Angleterre, en France un enfant vraiment malade ne pourra avoir accès à ces cellules souches qui pourraient le soigner aujourd’hui d’une pathologie réelle et non putative… Les parents de cet enfant pourraient-ils alors attaquer l’état pour « mise en danger » ou « non respect de ces engagements » ?

Au-delà des divagations plus ou moins drôles qu’on peut tirer de cette décision, cet exemple montre encore ce qu’est « l’interprétation » d’un texte par un juge et comment une loi qui semble parfaitement claire a tout le monde depuis des années (1 994…) peut voler en éclat selon l’interprétation qu’en fait un seul juge. À bien méditer donc.

Un calendrier des infirmières pour dénoncer la baisse des moyens à l’hôpital

Afin de faire passer leur message sur les baisses d’effectifs et de moyens et les dangers que cela représente, un groupe d’infirmières et du personnel paramédical de l’hôpital René-Dubos de Pontoise, ont eu l’idée de créer un calendrier et de la mettre en vente libre sur leur page Facebook. La dernière image en particulier (que nous reproduisons cette semaine comme illustration) ou des femmes de dos demandent s’il faut « qu’elles se mettent à nu pour qu’on s’intéresse à elles » interpelle et est devenue virale sur les réseaux sociaux.

À la semaine prochaine (pour un best of de l’année !!!)