L’exercice en secteur rural ou en milieu urbain recouvre des réalités particulièrement différentes. Deux infirmières libérales ont accepté de témoigner et de conseiller leurs consœurs prêtent à tenter l’aventure du libéral.
« En ville aussi il est possible d’être proche de ses patients »
Amandine, IDEL à Paris
« J’exerce dans le cœur de Paris, depuis bientôt six ans. C’est arrivé un peu par hasard. J’exerçais à l’hôpital en tant que vacataire et intérimaire ; une manière de gérer mon emploi du temps notamment pour être de repos les weekends. Puis j’ai eu l’envie de changer. Alors que je cherchais à m’installer en libéral, j’ai été en contact avec une infirmière qui exerçait dans Paris. Nous sommes toujours deux à exercer dans ce cabinet, au sein d’une maison de santé pluriprofessionnelle (MSP), où d’autres idel ont également leur cabinet. Nous avons signé l’Accord conventionnel interprofessionnel l’année dernière. Aujourd’hui, je suis au cœur de la vie du quartier, notamment parce que je travaille au sein d’un secteur restreint. C’est volontaire car en ville, nous n’avons pas les mêmes indemnités de déplacement que les infirmières en milieu rural. Elles sont moindres…L’idéal est donc de ne pas avoir à traverser tout Paris, bien au contraire. Il faut que nous puissions avoir des patients habitant le plus près possible les uns des autres. Aujourd’hui, j’effectue ma tournée en deux roues, mais j’ai longtemps travaillé en voiture, ce qui représente un risque d’être pris dans les embouteillages, ce que l’on ne peut pas se permettre. En ville aussi, il est tout à fait possible de nouer une relation de proximité avec ses patients même s’il est vrai qu’en milieu rural, les idel vont être davantage ancrées dans leur quotidien en allant à la pharmacie ou chercher leur pain. En ville, nous allons peut-être moins rendre ces services car ce sont surtout les auxiliaires de vie qui s’en chargent. Il ne faut toutefois pas hésiter à tisser des liens et se faire connaître des commerçants du quartier, des gardiens d’immeuble pour se faciliter la vie dans le travail. Car ils peuvent toujours nous rendre service, notamment pour obtenir le code des portes d’entrée ou nous appeler quand ils entendent parler d’un patient cherchant une infirmière. Et bien entendu, il faut également se faire connaître des professionnels du secteur, comme les pharmaciens, les médecins. Avoir une petite vie de quartier apporte du réseau et un côté chaleureux à l’exercice. »
« En zone de montagne, il faut connaître les routes secondaires »
Marieke, IDEL en Haute-Savoie
« Je suis installée depuis 15 ans en libéral en zone de montagne mais pas en station. Les premiers temps, je prenais tous les soins dans tous les villages environnants. Je faisais de 200 à 300 kms par jour. Progressivement, j’ai réduit mon secteur pour ne faire qu’entre 100 et 150 kms quotidiennement. Je prends en charge une trentaine de patients par jour : 20 le matin, et je ne pourrai pas prendre plus, à moins de trouver des patients ″voisins″ ; et une dizaine le soir. Les villages sont très distants les uns des autres, et très étendus. Nous avons aussi un village sans nom de rue. L’astuce est donc de connaître les habitants du village pour nous aider à nous orienter et de prendre en photo la maison, la première fois qu’on se rend sur place, afin de transmettre aux autres idel du cabinet. En secteur rural, bien entendu, il est primordial d’investir dans une bonne voiture, dans des pneus neige et des chaînes pour l’hiver. Et il est indispensable de connaître les routes secondaires : en été et en hiver pour éviter les touristes, et au printemps et à l’automne car les travaux sont nombreux. D’ailleurs, un conseil pour les infirmières qui s’installent : les cartes IGN sont un bon moyen pour se repérer, car le GPS ne nous donne pas toujours les meilleurs accès. Lorsqu’on a une tournée avec de nombreux patients, cela nous permet de visualiser le meilleur trajet. Pour l’anecdote, il peut toujours être intéressant de connaître des agriculteurs pour venir nous sortir du fossé avec leur tracteur en cas d’accident à cause de la neige. En secteur rural, tout le monde nous connaît. Les habitants nous voient passer dans les villages pour nous rendre chez les uns et chez les autres. Nous sommes vraiment considérées comme les infirmières de la famille. La confiance se transmet de génération en génération et les patients sont fidèles ! »